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  • Iles de la Madeleine
    – Un havre de pêche et de chasse sous contrainte
Site historique de la Grave
Site historique de la Grave, Route 199, île du Havre Aubert (auteur Michèle Séguin, sans modification, licence CC BY-SA 3.0)

L’île du Havre Aubert est la plus à l’ouest et la plus grande des îles de la Madeleine. Dans la partie est de l’île se trouve le site historique de La Grave, l’un des plus anciens lieux de pêche de l’archipel, qui occupe un isthme étroit en forme d’hameçon entre la pointe Shea et le cap Gridley, où se trouve également le musée ethno-historique de la mer…

Le site historique de La Grave comporte un ensemble de bâtiments en bois datant des 19ème et 20ème siècles, dédiés aux activités traditionnelles de la pêche aux îles de la Madeleine. C’est aussi au Havre Aubert que des Acadiens s’installèrent à partir de 1761, réfugiés de l’île Saint-Jean et de l’île Royale. En 1762, l’entrepreneur Richard Gridley, né à Boston, établit sur l’archipel un centre de pêche et de chasse aux morses et aux phoques et engagea à cet effet un groupe d’Acadiens et de Canadiens. C’est ainsi que prit naissance le premier noyau de peuplement sédentaire des îles de la Madeleine, au prix d’une contrainte très symbolique…

Un noyau de peuplement acadien

En août 1765, l’établissement de Gridley comptait 22 engagés, 17 Acadiens et cinq Canadiens-français, plusieurs bateaux de pêche et tout le matériel nécessaire pour transformer la graisse animale en huile. Depuis le traité de Paris (1763), les îles de la Madeleine étaient placées sous la juridiction de Terre-Neuve et les 22 engagés durent prêter allégeance à la couronne britannique, ce qu’ils avaient toujours refusé en Acadie. Cet acte symbolique marquait officiellement le début de la colonisation permanente de l’archipel, à dominante acadienne.

Plat commémoratif de la Constitution civile du clergé
« Je jure de maintenir de tout mon pouvoir la Constitution ». Plat commémoratif de la Constitution civile du clergé, 1790, Musée Carnavalet, Paris (photo Luis Fernandez García, sans modification, licence CC BY-SA 2.1 ES)

Bien plus tard, au début des années 1790, arrivèrent aux îles de la Madeleine une quarantaine de familles acadiennes, en provenance des îles Saint-Pierre et Miquelon. Des réfugiés ? Certes, une trentaine d’années plus tôt, ces Acadiens s’étaient bien réfugiés, à leur retour de captivité ou de déportation, aux îles Saint-Pierre et Miquelon restées françaises. Mais cette fois-ci, ils accompagnaient leur prêtre, Jean-Baptiste Allain, qui avait refusé de prêter serment à la constitution civile du clergé. Les contraintes politiques de la Révolution française avaient rattrapé ces îles lointaines du royaume de France. Le père Allain et ses fidèles Catholiques avaient ainsi préféré prendre la fuite dans des barges de pêche pour se réfugier en territoire britannique, dans cet archipel madelinot maintenant rattaché à la province de Québec. Les Acadiens ont-ils gagné au change ? Pas vraiment…

Le premier noyau de population acadienne grossit rapidement jusqu’à compter 100 familles. Mais le nouveau seigneur de l’archipel depuis 1798, Isaac Coffin, qui voulait des colons anglophones, exigeait des Acadiens une rente de censitaires pour des terres qu’ils occupaient pourtant depuis leur arrivée. Une très longue lutte s’engagea alors pour que les Acadiens obtiennent la pleine propriété de leurs terres. Ils n’eurent enfin satisfaction que bien plus tard, en…1895.

Voici quelques noms de familles acadiennes pionnières des îles de la Madeleine en 1762 (source répertoire des régions acadiennes du Québec) : Arsenault, Boudreau, Chiasson, Cormier, Desroches, Doucet, Gallant, Poirier…