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  • Bâton Rouge Ouest (Brusly)
    – Du navire le Beaumont à Molaisonville

En 1785 entre le 29 juillet et le 17 décembre, sept navires arrivent de France (des ports de Nantes et de Saint-Malo) à la Nouvelle-Orléans, plus précisément le Bon Papa (avec 38 familles acadiennes à bord), la Bergère (73 familles), le Beaumont (51), le Saint-Rémi (89), l’Amitié (68), la Ville d’Archangel (60), et la Caroline (28), soit 1308 personnes au total. Ces vaisseaux français sont nolisés par l’Espagne pour la traversée de l’Atlantique aux fins de coloniser la Louisiane espagnole face aux États-Unis en pleine croissance. Pour les Acadiens, le voyage signifie une chance de rejoindre leurs compatriotes en Louisiane. La grande majorité des nouveaux arrivants choisissent de s’installer le long du Bayou Lafourche. Toutefois sur les 51 familles du Beaumont, 41 d’entre-elles s’implantent près de Bâton Rouge. Ils sont principalement laboureurs, charpentiers, marins et calfateurs.

Le Gumbo de Louisiane
Le « Gumbo », signifiant mélange, est la cuisine officielle de la Louisiane (auteur Amadscientist, licence CC BY-SA 3.0, sans modification)

Entre 1765 et 1785 les Acadiens sont le plus grand groupe ethnique à s’établir en Louisiane. Bien que d’autres nationalités y soient établies, la culture acadienne devient dominante dans de nombreux endroits. Lorsque des fragments de ces autres cultures sont ajoutés aux Acadiens, une variante de la culture acadienne prend naissance. Ces gens et cette culture deviennent alors connus sous le nom de Cajun … une dérivation du mot Acadien.

Molaisonville puis Brusly

Le 14 mars 1699, Pierre Le Moyne d’Iberville et son frère Jean-Baptiste Le Moyne de Bienville (nés à Ville-Marie, aujourd’hui Montréal) viennent explorer le pays des Bayougoulas près du Bayou Manchac. Le territoire d’origine de l’actuelle paroisse de Bâton Rouge Ouest occupe ces anciennes terres autochtones. En 1717 la Compagnie du Mississippi, qui s’appelait Compagnie de l’Occident de 1684 à 1717, commence à octroyer des concessions foncières dans cette partie de la Louisiane.

En 1785, les réfugiés acadiens du vaisseau le Beaumont s’y installent en grand nombre. Pour les familles Benoit, Caillouet, Comeaux, Daigle, Dubois, Dugas, Forest, Garcia, Guedry, Granger, Hébert, Leblanc, Martin, Poirier, Richard, Trahan, et beaucoup d’autres, les terres concédées dans la contrée occidentale de Bâton Rouge sont devenues leur pays d’adoption. Le répertoire des 178 passagers à bord du Beaumont indique le nom, l’âge et le métier de chaque passager. Un bel outil de généalogie, quoi !

Brusly, anciennement Molaisonville, Louisiane (Photo crédit : West Baton Rouge Museum)

Brusly est la plus ancienne municipalité de la paroisse de Bâton Rouge Ouest. Bien que son incorporation eût lieu en 1901, sa genèse remonte à l’arrivée de France des Acadiens en 1785. Elle se situe en banlieue de la grande ville de Bâton Rouge. Jacques Moulaison (aussi Molaison), un charpentier âgé de 38 ans, son épouse Marie Doiron (41 ans) et leurs trois jeunes enfants, Rose (10), Sophie (9) et Jacques (6) sont officiellement considérés comme les premiers habitants. Après avoir démarré son propre commerce, un petit village s’est développé sous le nom de Molaisonville, pour devenir plus tard Brusly où le coton cultivé dans les environs était embarqué sur des bateaux à fond plat vers les centres de traitement et d’exportation.

Hôtel du gouvernement de la Louisiane à Bâton Rouge
L’hôtel du gouvernement de la Louisiane à Bâton Rouge ressemble à un bâton élevé (Photo crédit : Richard Rutter, Britannica)

Nous savons que le poste militaire établi par les autorités françaises à Bâton Rouge fut baptisé de ce nom en 1719. Mais quelle est sa signification réelle ? S’agit-il d’un nom autochtone, d’une borne de démarcation, d’un séchoir à viande, ou de cyprès rouges ? Malheureusement, il n’y a pas de consensus parmi les historiens.

Quatre hypothèses, toute aussi fascinante l’une que l’autre, ont été formulées :

1- Les Amérindiens ont depuis des siècles appelé la région Istrouma qui signifie bâton rouge. Les explorateurs des lieux ont tout simplement adopté la même appellation.

2- Les nouveaux arrivants ont observé un poteau de cyprès rouge démarquant une frontière entre deux peuples autochtones distincts, les Houmas et les Bayougoulas.

3- La caractéristique de l’endroit était un grand poteau que les indigènes utilisaient pour faire sécher leur gibier et les poissons et sur lequel la coulée du sang avait taché le bois d’un rouge cramoisi.

4- Des cyprès rouges dépouillés de leur écorce embellissaient le paysage avec leur reflet dans la tranquillité des eaux limpides.

C’est sous le régime anglo-américain que Bâton Rouge perdit son accent.