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  • Chezzetcook (Halifax)
    – Une ironie du sort plaisante à connaître
Halifax englobe Chezzetcook
Halifax englobe Chezzetcook (Photo crédit : Tony Webster, licence CC BY-SA 2.0, sans modification)

L’anse de Chezzetcook, son île Labrecque et sa plage Grand Désert, ainsi que son lac Petit et ses rues Bellefontaine, Bonin, Murphy et Petitpas, sont situés à environ 30 kilomètres à l’est du centre-ville d’Halifax. Aujourd’hui, Chezzetcook est partie intégrante de la Municipalité régionale d’Halifax (communément appelée Halifax). Nous savons que les pêcheurs français, basques et portugais fréquentaient ces côtes à la recherche de la morue abondante à la fin du XVe siècle et au début du XVIe siècle. En 1604, le roi Henri IV de France accorda un monopole sur ces terres à Pierre Dugua de Mons et toute la région fut connue sous le nom de La Cadie. L’Acadie de Chezzetcook est de nos jours un site historique acadien abritant un musée dédié aux expositions sur l’histoire locale. On oublie souvent que c’est Dugua de Mons qui a dirigé la fondation de Port-Royal (aujourd’hui Annapolis Royal) en Acadie, et de Québec au Québec, les deux premiers établissements français toujours habités en Amérique du Nord. Qui aurait cru lors de la fondation d’Halifax en 1749 par Edward Cornwallis que la francophonie précédait son geste par au moins une demi-douzaine de décennies. D’après le ministère des Communautés, de la Culture et du Patrimoine de la Nouvelle-Écosse le français est actuellement la langue maternelle de 11 935 résidents d’Halifax (anciennement Chibouctou, signifiant le havre le plus grand), ce qui représente 34,5% de la population totale des gens de langue maternelle française en Nouvelle-Écosse.

Selon le Musée virtuel du Canada (administré par le Musée canadien de l’histoire), une poignée de français et 33 familles Mi’kmaqs vivaient côte-à-côte sur les bords de l’anse de Chezzetcook dès 1688. Ces gens du pays dépendaient des ressources de la forêt et de la mer pour assurer leur subsistance. Il va sans dire que leur emploi du temps était déterminé par le comportement des animaux dont ils se nourrissaient.

L’anse de Chezzetcook
L’anse de Chezzetcook (Courtoisie de Kada Developments)

Les premières descriptions européennes du peuple Mi’kmaq ont été faites par le père Pierre Biard, un missionnaire jésuite français qui se trouvait en Acadie de 1611 à 1613, et par Nicolas Denys, un commerçant et entrepreneur français qui a vécu en Acadie de 1632 à 1670 (environ). Ils nous ont enseigné que les Mi’kmaqs chassaient le phoque sur les côtes et dans les îles côtières en janvier, puis l’orignal, le caribou, le castor et l’ours à l’intérieur des terres de février à la mi-mars. Dans la dernière moitié du mois de mars, les Mi’kmaqs se rendaient dans les zones côtières et estuariennes pour pêcher l’éperlan, puis le hareng à la fin avril. Les oiseaux migrateurs et le saumon revenaient aussi avec le printemps. De mai à la mi-septembre, les Mi’kmaqs récoltaient les crustacés et surtout les palourdes qui font encore la réputation de Chezzetcook et autres mollusques. Ensuite, certains se déplaçaient vers les affluents des rivières les plus larges pour pêcher l’anguille, alors que d’autres retournaient vers l’intérieur des terres pour chasser l’orignal, le caribou et le castor pendant les mois d’octobre et de novembre. En décembre, on pêchait la jeune morue sous la glace. Les Mi’kmaqs donnaient une description topographique aux lieux qu’ils occupaient. Chezzetcook signifie l’endroit où l’eau se répand rapidement dans de nombreuses directions.

Les Acadiens de l’anse de Chezzetcook

Maison patrimoniale de l’Acadie
Maison patrimoniale de l’Acadie de Chezzetcook, au premier plan (Courtoisie de Fonds Rosemary Eaton, Musée virtuel du Canada)

C’est vers 1701 que le premier habitant connu, Claude Petitpas II (né à Port-Royal en 1663), s’établit à Chezzetcook. Après le décès de son épouse Mi’kmaq Marie-Thérèse en 1721, il déménagea sa famille à Port-Toulouse (aujourd’hui St. Peter’s) sur l’Île du Cap-Breton. Nous savons qu’en 1748, sept ou huit familles acadiennes habitaient Chezzetcook. D’ailleurs Edward Cornwallis, le fondateur d’Halifax, a dit en 1749 « Il y a quelques familles françaises de chaque côté de l’anse ».

L’ironie du sort est que certaines familles acadiennes qui échappèrent à la déportation de 1755 ou revinrent d’exil après 1763 s’installèrent dans l’Acadie de Chezzetcook où ils y établirent une colonie permanente. Les Bellefontaine, LaPierre, Roma, Petitpas, Manet, Maillet, Brault, Bonnevie, Boudrot, Richard, Félix, Faucher, Lejeune, Clerget, Julien, Wolfe et Murphy ont été parmi les premières familles colonisatrices. Leur nombre augmenta lentement. En 1815, on comptait 47 familles acadiennes dans l’anse de Chezzetcook.