Bienvenue à Minudie (Courtoisie de CBC / Radio-Canada)

Minudie est une petite communauté rurale située dans l’estuaire de la rivière Hébert, nommée d’après Louis Hébert, un des premiers Acadiens et le co-fondateur de Port-Royal, qui a navigué sur la rivière. Dans l’histoire orale des lieux on raconte que les membres de la Première Nation Mi’kmaq auraient invité les gens de Port-Royal à venir à « Menoodeh » signifiant « Petit sac » dans la langue parlée des Autochtones, pour y chasser ou s’y installer avec leur famille. C’est au printemps 1672 qu’une demi-douzaine d’Acadiens arrivèrent en bateau et que les premières habitations européennes furent érigées. L’année suivante 12 autres arrivants de Port-Royal se joignent à la nouvelle colonie située au bout d’une petite péninsule ressemblant à un sac à main, en face de l’actuel refuge d’oiseaux migrateurs de la Pointe-Amherst qui fournit un habitat à une impressionnante variété de faucons, de hiboux et d’oiseaux chanteurs. Au fil du temps le paysage de Minudie, tapissé de boisés, d’étangs, de marais, de pâturages et de champs généreux, attira plusieurs colons.

Vers 1680, Jean Labarre et son épouse Catherine s’enracinent à Minudie où ils sont recensés en 1686 avec leur fille, Marie-Élisabeth, qui épousera vers 1698 Jean-Baptiste Forest de Port-Royal. Leurs descendants habitent encore Minudie malgré qu’à la fin de l’été 1750 leurs ancêtres durent brûler les maisons et prendre refuge sur le versant nord de la rivière Mésagouèche en territoire français. Voir la communauté d’Amherst (Beaubassin) pour de plus amples informations. Lors du Grand Dérangement de 1755 les familles de Minudie sont déportées dans les colonies anglo-américaines jusqu’en Géorgie. La plupart ne reviendront pas à Minudie qui devient, en 1765, la propriété de J.F.W. DesBarres. Celui-ci invite plusieurs familles acadiennes à devenir tenanciers sur ses vastes terres. Parmi ces familles se trouve celle de Pierre Doiron et Anne Forest de Minudie qui s’établissent sur le domaine rural de DesBarres à Nanpanne (aujourd’hui Nappan). Mais qui est ce grand propriétaire ?

Les Champs-Élysées de Minudie

Les Champs-Élysées de Minudie
Les Champs-Élysées à l’approche d’une rafale de neige (Photo crédit : Art Vaughan, flickr)

Joseph Frederick Wallet DesBarres (originaire de Montbéliard en France) était un ingénieur militaire dans les armées du général James Wolfe. En tant que lieutenant du Royal American Regiment il participa à la prise de Louisbourg en 1758 et à la bataille des Plaines d’Abraham à Québec en septembre 1759. De plus, il livra combat à la bataille de Sainte-Foy en 1760, et à celle de Signal Hill contre les Français à St. John’s, Terre-Neuve, en septembre 1762 (le dernier engagement entre la France et la Grande-Bretagne en Amérique du Nord). En 1765, DesBarres reçut 1000 acres de terre à Minudie, à titre de subvention gouvernementale pour son service militaire. Il acheta 5000 acres supplémentaires. Puis avec une humeur communicative, il baptisa ses champs aux plantes sauvages délectables, les « Elysian Fields » (Champs-Elysées).

Église Saint-Denis de Minudie
Église Saint-Denis située au 5534, rue Barronsfield, Minudie (Courtoisie de Minudie Heritage)

L’église Saint-Denis, plus précisément ses anciens bancs de bois, sont aujourd’hui les seuls vestiges des colonisateurs acadiens de Minudie. L’église, restaurée en 1977, reflète l’histoire culturelle, sociale, religieuse et architecturale d’une Acadie toujours vibrante malgré le dépeuplement des Champs-Élysées. C’est la troisième église catholique construite depuis l’invitation des Mi’kmaqs aux Acadiens de venir habiter au « Petit sac ». La première église fut une petite chapelle érigée en 1678 et incendiée 77 ans plus tard par les « Tuniques rouges » lors de l’expulsion des Acadiens. En 1768 avec le retour de quelques familles acadiennes, une deuxième chapelle (dédiée cette fois à Sainte-Anne) fut construite sur les fondations de la précédente. Puis après avoir acquis les Champs-Élysées de la succession de DesBarres, Amos Seaman, un homme d’affaires, fit construire l’église Saint-Denis en 1848 à côté de l’école du village sur un terrain qu’il donna gracieusement à l’archevêché. Hilaire Arsenault, un charpentier chevronné de Minudie, veilla aux travaux. La première messe fut célébrée au printemps 1849 par Thomas Lyons, le premier prêtre résident.

Devenue une communauté prospère vers 1870 avec une population culminant à plus de 600 citoyens, Minudie compte de nos jours une trentaine de personnes seulement. Celles-ci se dévouent avec fierté au maintien et à la restauration de leur patrimoine. D’ailleurs, la plupart sont des descendants des Acadiens d’origine. Chaque année, de nombreux visiteurs viennent y chercher leurs racines, se connecter au passé et plonger dans l’histoire de Minudie, une société qui mérite d’être connue dans le monde entier.